Quand les belles de nuits
Quand les belles de nuit se ferment sous la lune,
Quand les roses passent et que le vent fraîchit,
Quand la plaine est noyée par la pluie importune
Et la bruyère en pleurs au maquis dépérit,
L’aubépine est en deuil de son amie glycine,
Leurs parfums délicats n’embaument plus ce soir
Ma maison que l’hiver dans le givre enracine :
La voici toute nue et perdue dans le noir.
Mon jardinet n’est plus envahi de lumière ;
Tous ses oiseaux ont fui vers des cieux plus cléments
Et j’ai crainte, parfois, que ne tombe en poussière
Le bosquet épineux soumis aux éléments.
Au temps de juin, jadis, sous le ciel outremer
Que l’été habillait de robes diamant,
De l’éveil d’un bourgeon à la rose trémière,
L’abeille butinait caressée par le vent.
Les ruches bourdonnaient à l’ombre des tonnelles,
Frôlé par le zéphyr, le gazon frissonnait,
Du héron au moineau, à l’humble tourterelle,
Tout n’était que douceur…et la terre tournait.
En ce rugueux hiver, un soleil tremblotant
S’échoue à l’horizon comme un pesant fardeau,
Puis sombre dans l’étang happé par le néant,
Sous l’œil indifférent et morne d’un crapaud.
© Extrait de J’AI CONJUGUE LE TEMPS - ISBN N° 978-2-9538961-1-4