Où vont ?

Publié le par MOTS, ARTS & GOURMANDISE

OU VONT 1Où vont dormir les goélands

Lorsque s’incline enfin le soir

Et que la mer se vêt d’un manteau de chimères

Quand l’alizé murmure aux vagues la prière

D’une berceuse aux doux accords de nonchaloir ?

 

Où vont nicher les hirondelles

-Filles de l’air et du printemps-

Lorsque s’en va l’été vers d’autres horizons

Et range les pinceaux de la belle saison,

Scellant son chevalet écimé par l’autan ?

 

Où vont butiner les abeilles

Lorsque les lilas sont fanés

Et que l’écho des jours anciens semble si loin

Comme le temps de nos amours dedans le foin

Quand, à la belle étoile, on pouvait s’y rouler ?

 

Où vont galoper les chevaux

Quand la Camargue est ruisselante

Et que les gardians sont partis sans se tourner,

Quand le mistral revient, vainqueur, y pavoiser

Et les flamands déploient leurs ailes frémissantes ?

 

Où vont nager les ours blancs

Quand la banquise se fendille

Sous les baisers ardents d’une brise fervente,

Que l’océan se vêt d’une bure oppressante,

Ses goûtes de sueur roulant comme des billes ?

 

Où vont mourir les papillons

Lorsque la nuit se fait pressante,

Que les novas aux cieux entrouvrent leurs paupières,

Irisant l’horizon comme des dentellières

D’éclatants liserons sous la lune troublante ?

 

Où vont se jeter les torrents

Lorsque la pluie se fait rivière,

Quand le ponant s’endort au crépuscule mauve,

Evinçant le soleil, fatigué, qui se sauve

Sèchant les larmes du volcan, et sa colère ?

 

Où va se coucher le soleil

Quand il descend vers l’onde claire,

Laissant le port drapé d’un linceul envoûtant,

Quand le jour pâlissant enlarme le couchant

Et s’endort, à son tour, entre les vieilles pierres ?

 

Où vont s’allumer les étoiles

Illuminant le firmament,

Lorsque l’aube se pare et vient chasser la lune

Et la rosée étreint les roseaux dans les dunes

D’un long ruban de soie ambré et scintillant ?

 

Où vont se cacher les amants

Quand l’amour n’est plus qu’en coulisses

Et les flocons moqueurs dansent en robe blanche,

Des bouquets de houx vert suspendues à leurs hanches,

Recouvrant l’Univers d’une chaste pelisse ?

 

Les papillons, les hirondelles,

Les goélands et les chevaux,

Je ne sais pas qui les appelle

Quand l’hiver file l’écheveau,

 

Pourtant, je sais que les abeilles

S’en reviendront assurément

Quand les rayons du gai soleil

Réchaufferont tous les amants.

 

Et les torrents sous les étoiles

Qui scintillaient tels des rubis,

Lorsque le vent gonfle les voiles,

Miroiteront de verreries…

 

Mais, les habitants des banquises

Qui vivaient là jusqu’à présent

Ne pourront plus humer la bise

Qui faisait d’eux des conquérants !

 

 

© Extrait de J’AI CONJUGUE LE TEMPS – ISBN N° 978-2-9538961-1-4

Publié dans POEMES

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